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Barre-toi
4 novembre 2010

Les réseaux de François Fillon

Pour conjurer une rentrée à risques, le ministre des Affaires sociales s'est constitué en un temps record un cercle d'alliés influents et parfois inattendus.

Ses proches disent de cet homme politique discret et plutôt atypique qu'il est « pragmatique », « toujours à la recherche du point de convergence », qu'il a « un sens inné de la concertation ». C'est peu dire que ces qualités prêtées à François Fillon vont être sérieusement sollicitées cet automne. Propulsé n° 3 du gouvernement Raffarin, le ministre des Affaires sociales doit gérer une situation plus délicate qu'il ne l'avait sans doute imaginé avant l'été. L'emploi se grippe, les syndicats préparent les élections prud'homales en donnant de la voix dans les médias et dans la rue, et le dialogue social patine. Le ministre subit à la fois la pression constante du Medef, impatient de voir se concrétiser dans les faits le retour de la droite au pouvoir, et celle des syndicats, qui prennent au mot la promesse de la nouvelle majorité de donner sa chance à la négociation sociale.

Le sens politique de François Fillon ne lui suffira pas pour déminer cette rentrée sociale, le ministre devra aussi démontrer l'efficacité de ses réseaux, où se mêlent des amis, des alliés, et des partenaires privilégiés. C'est d'abord vers deux amis de longue date que Fillon s'est tourné avant d'accepter le portefeuille des Affaires sociales, deux personnalités sûres qui lui prodiguent de précieux conseils : Raymond Soubie, l'ancien conseiller social de Raymond Barre, et Pierre David, l'ancien directeur de cabinet de Joël Le Theule, son premier mentor en politique. Il a rencontré ce dernier par l'intermédiaire de ses parents. Son père était notaire et militant gaulliste, sa mère professeur d'anglais ; tous deux sont des copains de fac de Joël Le Theule, qui va aiguiller le « petit Fillon » vers la politique en lui proposant un poste d'assistant parlementaire. Une véritable rampe de lancement : Fillon suit Le Theule au ministère des Transports, puis à celui de la Défense dans le gouvernement Barre. A la mort de Le Theule, en 1980, Fillon revendique son héritage politique et devient député de la Sarthe l'année suivante.

Nicole Notat cite très vite son nom à Chirac

C'est une histoire plus inattendue qui a permis à François Fillon d'acquérir la carte maîtresse de son réseau, Jacques Chirac lui-même, un président qui ne cesse de dire du bien de son ministre et d'arbitrer en sa faveur (contre le ministre de l'Economie Francis Mer, notamment). Mais le courant n'est pas passé tout de suite entre les deux hommes. François Fillon avait commis de sérieux impairs en se rapprochant d'abord de Philippe Séguin, controversé et tumultueux, puis en ralliant le « traître » Edouard Balladur en 1995. Il n'était donc guère en odeur de sainteté auprès du clan chiraquien. Bertrand Landrieu, rencontré au cabinet de Le Theule, et Jérôme Monod, qui ont pourtant l'oreille de Jacques Chirac, ont longtemps joué les conciliateurs, en vain. Il a fallu attendre la candidature de François Fillon à la présidence du RPR - et l'obtention d'un joli score avec 25 % des suffrages des militants - pour que Chirac l'appelle afin de solder leurs différends. Fillon entretient d'ailleurs de très bonnes relations avec Frédéric Salat-Baroux, secrétaire général adjoint de l'Elysée, un poste stratégique dans le dispositif du Président.

François Fillon peut compter sur l'amitié d'une poignée de ministres au gouvernement, et d'abord de Roselyne Bachelot, qui lui avait apporté son soutien dans sa tentative de ravir la présidence du RPR. Henri Plagnol, Christian Jacob et Renaud Muselier appartiennent aussi au cercle de ses fidèles. Au Parlement, Fillon tire les bénéfices d'un patient travail de relations mené depuis dix ans. Une cinquantaine de députés lui sont acquis : liés au réseau séguiniste, (Jean Besson, Michel Bouvard ou Michel Terrot) et des nouveaux amis (François Baroin, Georges Tron et Gilles Carrez, qui partagent les mêmes valeurs sociales du gaullisme).

Si, au printemps dernier, Fillon rêvait du portefeuille de la Défense, il a vite comblé ses lacunes en matière sociale. Il a d'abord profité de son expérience de ministre délégué à la Poste, aux Télécommunications et à l'Espace entre 1995 et 1997, où il avait noué de précieux contacts dans les milieux syndicaux pour gérer en douceur l'ouverture du capital de France Télécom. Notamment avec Marc Blondel, avec qui il entretient des relations directes et cordiales. Pendant les grèves de 1995, il avait déjeuné à plusieurs reprises avec le leader de Force ouvrière, jugé alors « infréquentable » par l'équipe d'Alain Juppé. C'est aussi à cette époque qu'il a noué une relation de confiance avec Nicole Notat, qui fut d'ailleurs l'une des premières à citer son nom à Jacques Chirac. Mais c'est le sénateur Gérard Larcher, le président RPR de la Commission des affaires économiques, qui lui sert de poisson pilote dans le monde syndical. Complices, ils ont déjà des interlocuteurs solides et bien ciblés, comme Jean-Marie Toulisse, secrétaire national de la CFDT, et Jean-Christophe Le Duigou, secrétaire confédéral de la CGT, l'économiste « moderniste » de la centrale. En quelques mois, Fillon a fait vite : son réseau est plus étoffé dans le monde syndical que dans celui des patrons !

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François Fillon en cinq dates

- 4 mars 1954 : naissance au Mans

- 1981 : député RPR de la Sarthe

- 1993 : ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche

- 1995 : ministre délégué à la Poste, aux Télécommunications et à l'Espace

- Mai 2002 : ministre des Affaires sociales, du Travail et de la Solidarité

SES ANTENNES SYNDICALES

Dans les principales centrales, Fillon s'est choisi des partenaires privilégiés de discussion, pour tester des idées et appréhender les rapports de force. Il connaît bien Marc Blondel, le secrétaire général de FO depuis près de dix ans. Il a découvert plus récemment Jean-Marie Toulisse à la CFDT et Jean-Christophe Le Duigou à la CGT.

SES RELAIS PARLEMENTAIRES

François Baroin, député UMP de l'Aube, et Georges Tron, député UMP de l'Essonne, qui partagent avec lui les valeurs sociales du gaullisme, sont des atouts précieux à l'Assemblée. Pièce maîtresse du dispositif, le sénateur RPR des Yvelines est celui qui facilite ses relations avec les syndicats.

SES COPAINS MINISTRES

Il a travaillé avec la ministre de l'Ecologie au conseil régional des Pays de la Loire. Il peut compter sur Henri Plagnol (Réforme de l'Etat), et sur Christian Jacob (Famille).

SES ÉCLAIREURS PATRONAUX

Trois amis intimes lui font découvrir les cercles patronaux : Raymond Soubie (Altedia), Noël Forgeard (Airbus) et Marc Ladreit de Lacharrière (Fimalac).

SA GARDE RAPPROCHÉE

Directeur de cabinet, Jean-Paul Faugère a rejoint ses plus proches collaborateurs, Daniel-Georges Courtois, directeur adjoint du cabinet, et Igor Mitrofanoff, conseiller et « plume » du ministre.

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