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Barre-toi
2 décembre 2010

Technologie et gratuité, le paradoxe du consommateur 2.0

En prenant l'exemple de la mise en ligne du dernier Houellebecq en libre accès, Aliocha s'insurge de ce nouveau mode de consommation qui voudrait que tout soit gratuit - en particulier l'accès à Internet et à la culture - au nom d'une révolution démocratique. Dans le même temps, ces consommateurs révolutionnaires, se jettent sur le dernier joujoux technologique, à la mode et hors de prix.

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Ah ! Comme ils fanfaronnent les geek ! Ils ont trouvé, ou plutôt ils pensent avoir trouvé la faille juridique  qui permettrait la diffusion gratuite  du dernier roman de Houellebecq sur le web. Encore un coup de poing dans la gueule de ce vieux monde qui n’en finit pas de mourir. On ne prête qu’aux riches, dit-on. Sur Internet, on ne vole que les riches… croit-on.

A bas les  éditeurs qui s’engraissent sur le talent des créateurs d’oeuvres originales, mais aussi et surtout sur le dos des braves citoyens-consommateurs, vive la gratuité démocratique du web ! On veut tout gratuit. L’information, le divertissement, les photos, les livres savants, mais aussi les romans, la bande dessinée, la musique, les films, tout vous-dis-je ! Du gratuit comme s’il en pleuvait. A bas les vieilles lois protégeant les droits des créateurs et leur permettant de vivre de leur travail, à bas toutes ces tyrannies d’un autre âge qui furent pourtant, en leur temps, de formidables avancées. Liberté, égalité, gratuité !

Car la démocratie voyez-vous, c’est la gratuité. Faire payer, fut-ce très modestement, l’accès à la culture, c’est réac’, anti-démocratique, c’est aussi le signe d’un vieux monde capitaliste qui refuse encore de s’effacer devant la démocratie technologique triomphante. Et comme on peine à financer les contenus sur Internet, il faudra bien s’attendre à ce que la mort des éditeurs et des majors soit suivie de celle des écrivains, des photographes, des artistes en tous genres, bref, de tous ceux qui vivaient plus ou moins bien de leur travail ou de leur art. Et des journalistes, aussi. Qu’importe, Julian Assange est devenu le grand journaliste mondial, ça suffira bien.

Et avec l’argent ainsi économisé, vous savez ce que fera le peuple enfin installé dans une vraie démocratie ? Non ? Je vais vous le dire, ce qu’il fait déjà sous l’impulsion du marketing agressif des nouveaux tyrans capitalistes qu’il érige sur les ruines de ceux qu’il a abattus. Il se ruinera en ordinateurs toujours plus performants, tablettes révolutionnaires, téléphone aptes à toutes les fonctions excepté tondre la pelouse (pour l’instant) et accessoires pour tous ces joujoux car il faut bien les transporter, les équiper, les customizer, les soigner, les enrichir, les faire réparer, les développer, les remplacer,  les collectionner et, tenez, puisque c’est bientôt Noël, les offrir. Sans compter les fournisseurs d’accès qui, moyennant une somme plus ou moins modique par mois mais qui en fin d’année pèse son poids sur un budget, vous permettent d’accéder à Internet, au téléphone, à la télévision etc. Et les grands acteurs de la téléphonie mobile, qui, moyennant eux aussi un abonnement mensuellement presque indolore permettent de téléphoner, d’accéder à Internet etc. Gratuit le web ? Laissez-moi rire….On ne rémunère plus la création intellectuelle, mais l’innovation technologique. C’est un choix. Mais qu’on ne vienne pas me parler de révolution démocratique là où il n’y a qu’un changement de mode de consommation.


Technologie et gratuité, le paradoxe du consommateur 2.0

Qu’est-ce qu’ils doivent rigoler tous les fabricants de gadgets technologiques en observant leurs clients revendiquer comme une liberté fondamentale le droit d’accéder à tous les produits culturels gratuitement. Pendant ce temps, ils calculent le prix du prochain produit incontournable qu’ils lanceront à grands coups de marketing viral sur la toile. Ah! Ils doivent se fendre la poire. J’en viens même à me demander s’ils ne sont pas à l’origine de ce grand mouvement libertaire, car le budget des consommateurs n’est pas extensible, n’est-ce pas ? Il faut donc choisir entre payer du contenu et financer en trois fois sans frais le dernier objet à la mode…
Parvenir à peindre un caprice de consommateur inspiré par des géants industriels qui s’emploient chaque jour à créer de nouveaux besoins pour les satisfaire ensuite de la manière la plus ludique et surtout la plus couteuse qui soit, sous les nobles traits d’une révolution démocratique pour l’avènement d’un nouveau monde libre et d’accès gratuit, il fallait le faire. Chapeau !
S’il fallait adapter à notre époque le fameux tableau de Delacroix, La liberté guidant le peuple, je gage que la liberté aurait les traits de Bill Gates et que le drapeau serait frappé du logo de Microsoft.
Le plus piquant, dans cette affaire, c’est qu’elle arrive à Houellebecq, c’est-à-dire à l’auteur qui exprime mieux que quiconque à l’heure actuelle  le vide sidéral d’une société qui n’aspire à plus rien d’autre qu’à consommer.
Lui aussi, il doit bien rigoler….


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